Département d’État des États-Unis
Antony J. Blinken, secrétaire d’État
Le 18 mai 2022
Siège des Nations unies
New York
MONSIEUR LE SECRÉTAIRE BLINKEN : Bonjour à toutes et à tous. Bienvenue. Je vous remercie d’être là aujourd’hui.
Nous nous réunissons au moment où sévit la plus grande crise mondiale de sécurité alimentaire de notre époque. Il s’agit d’une crise qui, nous le savons tous, se développe depuis des années en partie à cause de la pandémie et de l’accélération de la crise climatique. Entre 2016 et 2021, le nombre de personnes vivant en situation d’insécurité alimentaire aiguë, c’est-à-dire le niveau auquel l’incapacité d’une personne à consommer une nourriture adéquate met sa vie ou ses moyens de subsistance en danger immédiat, a explosé, passant de 108 millions de personnes à 161 millions de personnes dans le monde.
C’est cette crise croissante qui a conduit l’ambassadrice Thomas-Greenfield à faire du lien entre la sécurité alimentaire et les conflits le thème central d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies qu’elle a présidée en mars de l’année dernière. Et c’est la raison pour laquelle les États-Unis ont pris des engagements fermes lors du Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires organisé par le secrétaire général en septembre dernier.
Tout cela, c’était avant l’invasion non provoquée de l’Ukraine par le gouvernement russe qui, selon la Banque mondiale, pourrait plonger 40 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté et l’insécurité alimentaire cette année. En effet, tous les facteurs de la crise dont nous allons parler aujourd’hui ont été aggravés par la guerre choisie par le président Poutine.
C’est pourquoi nous avons pensé qu’il était si important de convoquer ce groupe de haut niveau afin de mettre en lumière l’impact dévastateur de cette crise et de mobiliser au niveau mondial les efforts nécessaires pour y faire face. C’est un sujet sur lequel nous nous penchons tous les jours au département d’État et au sein du gouvernement des États-Unis. Mais il s’agit d’une crise qui exige une réponse mondiale.
Demain, j’aurai l’occasion de diriger une session au Conseil de sécurité consacrée à la manière dont des conflits comme celui-ci alimentent l’insécurité alimentaire et dont l’insécurité alimentaire croissante menace la paix et la sécurité dans le monde, des problèmes que nous devons aborder dans leur ensemble. Aujourd’hui, lors de notre réunion, nous voulons nous concentrer sur ce que nous pouvons faire pour sauver des vies maintenant et nous attaquer aux causes à long terme de ce problème.
Je commencerai par faire quatre suggestions, du moins de la part des États-Unis, sur ce que nous pouvons faire. Cela dit, cette réunion a pour but d’entendre les points de vue de divers collègues et pays à la fois sur la manière dont cette crise affecte les vies dans vos pays respectifs, mais aussi sur ce que nous pouvons faire ensemble pour y remédier.
Premièrement, de notre point de vue, nous avons besoin que les pays intensifient leurs efforts en apportant de nouvelles contributions substantielles pour combler les lacunes auxquelles sont confrontées les organisations et agences humanitaires qui luttent contre l’insécurité alimentaire et qui obligent les groupes humanitaires à prendre des décisions incroyablement déchirantes pour savoir quand et où réduire l’aide vitale. Le coût des activités d’organisations vitales telles que le Programme alimentaire mondial, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’UNICEF et d’autres, le coût des activités augmente. Nous devons les aider à poursuivre leurs activités.
En particulier, les pays disposant d’importantes réserves de céréales et d’engrais, ainsi que ceux qui ont des ressources financières, doivent intensifier leurs efforts et le faire rapidement. Les États-Unis ont annoncé un nouveau financement de plus de 2,3 milliards de dollars pour l’aide alimentaire d’urgence afin de répondre aux besoins humanitaires mondiaux depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Aujourd’hui, compte tenu de l’urgence de la crise, nous annonçons une nouvelle aide alimentaire d’urgence de 215 millions de dollars. Et nous ferons beaucoup plus. Nous attendons de notre Congrès qu’il approuve très prochainement un financement supplémentaire d’environ 5,5 milliards de dollars pour l’aide humanitaire et la sécurité alimentaire.
Les gouvernements et les organisations internationales peuvent également s’unir pour contraindre la Fédération de Russie à créer des couloirs afin que la nourriture et les autres fournitures vitales puissent quitter l’Ukraine en toute sécurité par voie terrestre ou maritime. On estime que 22 millions de tonnes de céréales sont actuellement stockées dans des silos en Ukraine, des denrées qui pourraient être immédiatement utilisées pour aider les personnes dans le besoin si elles pouvaient simplement quitter le pays.
Deuxièmement, nous pensons que nous devons nous attaquer à la pénurie mondiale d’engrais. Prenons l’exemple de l’Afrique, où le coût des engrais a déjà quadruplé depuis le début de la pandémie et s’est encore envolé depuis l’invasion russe de l’Ukraine. L’un des moyens d’y remédier consiste à inciter les pays à produire davantage d’engrais, à l’instar des États-Unis qui ont engagé 500 millions de dollars pour stimuler la production américaine. Nous pouvons également aider les agriculteurs à optimiser l’efficacité des engrais en tirant parti des progrès réalisés par des pays comme l’Éthiopie.
Certains ont tenté d’imputer l’aggravation de cette crise aux sanctions imposées à la Russie, à la Fédération de Russie, par les États-Unis et de nombreux autres pays. C’est faux. Lorsque nous avons imposé des sanctions à la Russie afin de mettre un terme à la guerre le plus rapidement possible, nous avons délibérément et soigneusement créé des exceptions pour les produits agricoles et les engrais. Nous travaillons chaque jour pour fournir aux pays les informations ou l’assistance dont ils ont besoin pour s’assurer que les sanctions n’empêchent pas la nourriture ou les engrais de quitter la Russie ou tout autre pays.
Au même titre que sa décision de déclencher cette guerre injustifiée, la responsabilité d’interrompre ces approvisionnements et des souffrances causées dans le monde entier incombe directement et uniquement au gouvernement russe.
Troisièmement, nous pensons que nous devons accroître les investissements dans les capacités et la résilience de l’agriculture. C’est ce que font les États-Unis par le biais de notre programme Feed the Future qui investira 5 milliards de dollars dans plus de 35 pays sur cinq ans, ainsi que par notre soutien de longue date aux centres internationaux de recherche agricole. C’est également l’objet de l’Agriculturel Innovation Mission for Climate que nous avons lancée il y a un an de cela avec les Émirats arabes unis pour tenter de doper les investissements dans une agriculture adaptée au climat.
Quatrièmement, nous pensons que nous devons aider les populations pauvres et vulnérables à supporter l’impact colossal de cette crise. Les institutions financières internationales ont un rôle essentiel à jouer à cet égard. C’est pourquoi notre secrétaire au Trésor, Janet Yellen, a convoqué une session avec les dirigeants des institutions financières internationales il y a quelques semaines et a fait pression pour que soit élaboré le plan d’action des institutions financières internationales visant à lutter contre l’insécurité alimentaire qui a été publié en marge de la réunion des ministres des Finances du G7 d’aujourd’hui.
Enfin, si nous voulons sauver des vies, nous devons tous être prêts à assumer un risque supplémentaire. La semaine dernière, le président Biden s’est rendu dans une ferme familiale dans l’Illinois. Il a expliqué comment des exploitations comme celle qu’il a visitée s’efforcent de pratiquer la double culture, en récoltant deux cultures dans le même champ sur une même année. C’est quelque chose qui ne fonctionne pas toujours. Les saisons de croissance sont courtes. La météo ne coopère pas toujours. Mais comme l’a dit le président, c’est un risque que nous devons prendre. Notre gouvernement s’efforce donc de fournir une assurance supplémentaire aux agriculteurs américains qui sont prêts à tenter cette expérience.
Si nous prenons ces mesures ensemble, à savoir répondre aux besoins urgents en nourriture, en engrais et en financement, ainsi qu’investir davantage dans la résilience de l’agriculture et des populations vulnérables, nous surmonterons cette crise, nous contribuerons à en prévenir d’autres et, surtout, nous sauverons d’innombrables vies. C’est ce qui est en jeu, mais je suis convaincu que si nous nous unissons, nous pouvons relever ce défi.
Je vous remercie encore une fois d’être là. C’est maintenant un honneur et un privilège de donner la parole au secrétaire général qui a joué un rôle de premier plan dans la mobilisation de la réponse à cette crise.
Monsieur le secrétaire général.
Voir le contenu d’origine : https://www.state.gov/secretary-antony-j-blinken-at-the-food-security-ministerial/
Nous vous proposons cette traduction à titre gracieux. Seul le texte original en anglais fait foi.